Le chemin des âmes – Joseph Boyden

Mon ennemi, lui, ne le comprend peut-être pas quand je l’envoie sur le chemin des âmes, mais j’espère qu’il comprendra le jour où je le rencontrerai à nouveau.

Ce livre n’était pas du tout dans ma Pile à lire des vacances mais il y est arrivé presque par hasard : ayant reçu une box littéraire, je me suis amusée à regarder les livres reçus des utilisateurs sur le compte Instagram de La Kube. Et celui-ci a retenu mon attention. Un petit tour sur Babelio, une moyenne de 4,38/5, une lecture du résumé plus celle de quelques avis et j’ai été le chercher à la bibliothèque. Parfois, c’est aussi simple que ça. Et je ne suis pas déçue.


Les premiers mots

    Progressant dans la neige, nous remontons notre piste jusqu’aux pièges tendus sous les saules. J’ai pris la tête. Je sommeille encore. L’air est vif. Pique les poumons. Elijah marche dans mes traces. Le soleil paraît.
    À chaque enjambée, la croûte cède sous mes pieds: trop froids, la nuit dernière. Elijah s’efforce d’aller sans bruit; mais son pas est lourd.
    Elijah et moi, nous avons le même âge. Nous avons vécu douze hivers.

Sur le Chemin des Âmes, les hommes de la Première Guerre Mondiale sont nombreux. Des hommes qui ont combattu pour la liberté, des jeunes, des vieux, des innocents.

Mais avant d’arriver sur ce chemin, Xavier et Elijah vont devoir se battre et combattre l’ennemi. Quitte à perdre leur âme et leur identité.

1919, sur le quai d’une gare au Nord de l’Ontario, Niska, une vieille indienne,  croit attendre le meilleur ami de son neveu qui revient d’Europe. Mais c’est bien lui qui descend du train, amputé, blessé de guerre. Pendant le long voyage du retour dans leur contrée, nous remontons le temps. Celui de la tante et son enfance et aussi celui de Xavier et sa vie dans les tranchées.

Dans cette guerre qui déchire toute l’Europe, nombreux sont les jeunes qui ont été enrôlés de gré ou de force, prêts à se battre et forcés de perdre toute humanité. Xavier et Elijah vont vivre à deux cette expérience éprouvante alors que rien ne les destinait à partir sauver l’Europe. Ils ont grandi dans le grand Nord, chez les Indiens, dans les forêts. Ils étaient doués pour chasser les bêtes, ils vont devoir apprendre à chasser les hommes. 

Arrivés en Europe, ils découvrent les atrocités des tranchées et la vie des soldats. Rapidement, ces deux Indiens se font remarquer: Elijah, pour ses dons de tirs et Xavier pour son mutisme et ses observations. On comprend rapidement qui a de l’ascendant sur l’autre. Xavier est dans l’ombre de cet ami que tout le monde admire et il commence peu à peu à vouloir s’en distancer, d’autant plus qu’Elijah devient vite accro à la morphine et est pris d’une folie meurtrière.

Moi, je voudrais rester dans mon coin. Je ne m’amuse pas, moi, dans cette guerre; pas comme Elijah.

Par certains moments, les horreurs de la guerre sont mises de côté et on se concentre sur la destinée de la tante,  avec son père chamane, la tribu Cree en voie d’extinction, la vie dans la forêt, les prières, les incantations pour la vie de l’Au-delà, les remèdes miracles. Et aussi, son existence en tant que petite fille épileptique, qui reçoit des messages prémonitoires lors de chaque crise, sa vie seule, isolée, mais qui est dotée d’une force incroyable. Sa foi en son neveu, sa volonté à l’extirper de ses souvenirs de guerre et le soulager. Toutes ces caractéristiques en font une femme magnifique.

Ce récit décrit à merveille deux mondes totalement différents, c’est ce qui le rend original. Parce que des histoires de guerres, on en connaît. Des histoires d’Indiens présent lors de la Première Guerre Mondiale, moins.

C’est aussi un roman d’une tristesse infinie. Quelques beaux moments sont partagés mais ils sont vite interrompus par la noirceur des âmes, la souffrance de ces hommes et la barbarie

J’ai pris mon temps avec ce livre, quitte à ne lire que quelques pages par jour mais je ne pouvais pas plus, parce qu’il était si dense et si éprouvant qu’il fallait que je reprenne mon souffle pour continuer. 

Evoquer [la mémoire de Gilberto] ne ferait qu’inviter la tristesse et la tristesse, par ici, monte aussi vite dans les tranchées, jusqu’à tout noyer. 

– Le chemin des âmes de Joseph Boyden. Edition Albin Michel, 2006. 391 pages.-

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