La Comtesse des digues – Marie Gevers

Les premiers mots

Dans nos plaines, l’Escaut est roi. Point de rochers qui l’enserrent, ni de collines qui le détournent; le fleuve régit le pays et va comme il veut. Au long des siècles, les riverains sont parvenus à lui prendre quelques terres basses qu’un réseau de digues protège, que des écluses drainent ou irriguent. De grands remparts de boue durcie contiennent les marées, et à chaque pleine lune, les bateaux passent plus haut que la cime des noyers et des pommiers.

À la mort de son père, Suzanne se retrouve à devoir gérer les digues en tant que comtesse des digues. Si cela est pour l’instant provisoire, car aucune femme ne l’a jamais été, elle ressent cette responsabilité comme un fardeau. Elle s’était toujours dit que dans un futur plus ou moins proche, elle partirait de ce village pour se rapprocher de la ville. Mais il est des décisions plus difficiles à prendre que d’autres. Surtout quand l’amour sous différentes formes se met à faire des siennes.

Quand elle sentit sous la barque le gonflement du courant, une grande joie l’envahit. Le souvenir de son père revenait si intact, si parfait que ce fut comme une réunion. Il lui sembla le voir assis à côté d’elle, silencieux et contemplatif. Le vent lui parlait, la couleur de l’eau, l’affleurement des bancs de sable, et jusqu’aux taches des taupinières, ennemies des digues, jetées comme des éclaboussures parmi l’herbe neuve.

Pour cette semaine consacrée à la francophonie, je voulais consacrer ma seule et unique lecture à un livre belge et mon choix s’est porté sur celui de Marie Gevers (gentiment prêté par Magali). Le résumé m’a directement plu et la lecture que j’en ai faite fut agréable. Pas exceptionnelle mais agréable car l’écriture de Marie Gevers est très délicate dans les descriptions de la nature et des sentiments des personnages. A la lecture de certains passages, durant lesquels Suzanne évoque sa vie près de l’eau, il est difficile de ne pas nous sentir nous aussi proche de cette nature presqu’idyllique et champêtre.

Quant au thème de l’amour, qui prend un peu trop de place pour moi, il est amené avec toute la grâce de notre personnage principal. Confuse dans ses sentiments, elle hésite tout du long entre deux hommes, en attendant que ceux-ci prennent leur décision. N’étant pas habituée à dévoiler ses émotions, Suzanne doit s’arranger avec ce qu’elle ressent et ce qu’on attend d’elle.

Ce roman, par le monde qu’il décrit, pourrait être considéré comme désuet mais ce serait alors passer à côté de Suzanne qui à elle seule porte le roman avec sensibilité et fraicheur.

La Comtesse des digues de Marie Gevers
Éditions Espace Nord
260 pages, première édition en 1931
Les Classiques c’est fantastique – Saison 4

5 réflexions sur “La Comtesse des digues – Marie Gevers

  1. Katell BOUALI dit :

    Contente que « La Comtesse des digues » t’ait plu. J’ai découvert ce roman grâce à mon club lecture local et j’avais été conquise par l’écriture de l’autrice et par l’atmosphère du roman. Un roman méconnu qui gagne à être connu et lu.

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  2. Madame lit dit :

    Je l’ai reçu en cadeau d’une amie belge et je l’ai bien aimé. J’ai d’ailleurs rédigé une chronique sur ce dernier sur mon blogue si jamais cela t’intéresse. Une belle histoire très bien écrite.

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