Entre ciel et terre– Jón Kalman Stefánsson

En cas de choix entre la vie et la mort, la plupart des gens optent pour la vie.

Les premiers mots

C’était en ces années où, probablement, nous étions encore vivants. Mois de mars, un monde blanc de neige, toutefois pas entièrement. Ici la blancheur n’est jamais absolue, peu importe combien de flocons se déversent, que le froid et le gel collent le ciel à la mer et que le frimas s’infiltre au plus profond du cœur où les rêves élisent domicile, jamais le blanc ne remporte la victoire.

Entre Bárður et le gamin, c’est une histoire d’amitié. L’amour pour les mots et la poésie les lie de manière indéfectible. Tous deux sont à la recherche des mots qui sauvent, des mots qui pansent les plaies et qui rassurent. Bárður les a trouvés dans le poème « Le Paradis Perdu« , un poème du poète Milton, qu’il adore réciter. Trop occupé à mémoriser les vers, il en oublie sa vareuse et part en mer, pour la pêche à la morue.  Sur le bateau, le vent est glacial et mortel pour celui qui n’a qu’une simple blouse pour l’en protéger. Le pêcheur meurt et sa mort plonge le gamin dans une indescriptible douleur et solitude. Pour donner un sens à sa vie, ou du moins pour essayer d’en trouver un, il s’en va remettre le recueil de poésie à celui qui l’avait prêté à son ami, un vieux capitaine devenu aveugle. 

Les mots sont des flèches, des balles de fusil, des oiseaux légendaires lancés à la poursuite des héros, les mots sont des poissons immémoriaux qui découvrent un secret terrifiant au fond de l’abîme, (…) mais parfois ils ne sont rien, des guenilles usées, transpercées par le froid, des forteresses caduques que la mort et le malheur piétinent sans effort.

Indéniablement, c’est une lecture d’hiver. Pas une lecture d’été. C’est un livre qu’on doit lire blotti dans une couverture, réchauffé par un feu de cheminée, pour être totalement enveloppé dans cette atmosphère poudreuse et fascinante comme la neige qui recouvre ces villages islandais. La poésie qui se dégage de ce livre est merveilleuse et même si je me suis sentie perdue durant quelques pages, les mots de Stefánsson ont réussi à me tendre la main et à me laisser bercer par eux. Car si la première partie du livre m’a paru lisible et compréhensible, la deuxième m’a semblé plus floue (il s’agit de la partie où il arrive dans le village du capitaine). On y rencontre d’autres personnages et les liens établis avec le gamin ne m’ont pas toujours apparu clairement. Mais peu importe, car l’écriture m’a enchantée. C’est ce genre de plume que j’aime et que je recherche de plus en plus et je la retrouve souvent chez les auteurs islandais (comme pour le très beau « J’ai toujours ton coeur avec moi« ).
J’ai rempli mon carnet de quelques phrases et si je m’étais écoutée, j’aurais pu retranscrire des pages et des pages.
Il me tarde de me plonger dans « La tristesse des anges » .

Nous devons prendre soin de ceux qui nous sont chers et à qui nous le sommes.

– Entre ciel et terre de Jón Kalman Stefánsson, Editions Gallimard, Collection Folio, 2011, 272 pages – 

27 réflexions sur “Entre ciel et terre– Jón Kalman Stefánsson

  1. Lectures Gourmandes dit :

    C’est vrai que les plumes islandaises ont toutes quelque chose de doux et enchanteur !(J’ai eu une révélation avec Audur Ava Olafsdottir ! ) Je note cette lecture, peut-être pour cet hiver ? 🙂

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  2. Laeti dit :

    Je crains que cela ne soit un peu trop « flou » pour moi même si j’ai aimé certains titres islandais comme Lettre à Helga ou dernièrement J’ai toujours ton coeur avec moi. c’est vrai que les auteurs islandais sont très plaisants et je n’en lis presque jamais en plus!

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  3. celina dit :

    Oh, merci pour ce beau billet, tu sais trouver les mots ! Je retrouve ce que j’avais aimé en lisant ce roman, la beauté de l’écriture et un certain flou (j’aime bien quand ça flotte un peu, quand ce n’est pas trop défini :-). )
    Une lecture du froid en plein été, je dis oui ! D’ailleurs, je vais bientôt lire « Palais de glace » du norvégien Vesaas. 😉

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  4. AMBROISIE dit :

    Je l’ai vu plusieurs fois défiler ce livre en librairie, mais je ne sais pas, je n’en avais pas très envie. Pourtant ton avis me donne très très envie, et plus encore je pense l’acheter pour l’offrir, il parait un baume au coeur pour toutes les blessures de la vie.

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  5. Nad dit :

    Oh my god dire que j’ai failli passer à côté de ton billet, je m’en serais voulue!!!
    J’ai ADORÉ la trilogie! Ces livres sont des coups de cœur pour moi. Depuis mon voyage en Islande je n’ai jamais cessé de m’émerveiller devant les auteurs islandais qui arrivent à décrire les paysages avec finesse. Cet auteur y arrive merveilleusement bien. Merci d’en parler si bien, que je suis heureuse de lire ce billet ❤
    Bisous

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