En Italie, il n’y a que des vrais hommes – Luca de Santis & Sara Colaone

Tout le monde ici, me dit que je ne comprends pas! Eh bien, vous n’avez qu’à m’expliquer, brigadier, parce que moi, vraiment, je ne comprends pas…pourquoi je suis là?!

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Prologue

Il y a ces histoires que l’on trouve partout dans les rayons des librairies et qui ont comme sujet récurrent les tueurs en série. Et puis il y a les autres…qui semblent se cantonner aux bibliothèques des universités. La persécution des homosexuels en Italie en fait partie. Ce pays a utilisé, contre ses lesbiennes et ses gays, une arme souvent plus sournoise que la répression brutale: le silence.

Au détour des rayons de ma bibliothèque, j’ai trouvé cette bande dessinée. C’est d’abord le titre qui m’a interpellée et ensuite sa quatrième de couverture : « Les lois raciales de l’Italie fasciste ne prévoyaient pas de peines à l’encontre des homosexuels : cela était inutile, puisque, d’après Mussolini, tous les hommes italiens étaient mâles, actifs et virils.« 

La bande dessinée commence par un prologue qui explique un pan de l’Histoire italienne à l’époque fasciste. Les homosexuels étaient « parqués »  dans des lieux éloignés. Un de ces lieux était l’île de San Domino delle Tremiti. Quand la guerre éclata, ils purent retourner chez eux car ces îles allaient servir de prisons pour les détenus politiques. Leur retour « à la maison » signait leur déshonneur et tachait les familles d’un scandale difficile à cacher.

Le scénariste et la dessinatrice ont décidé de mener cette bd comme un reportage. Deux journalistes vont à la rencontre d’un rescapé d’une de ces îles, un certain « Ninella ». Celui-ci n’est pas des plus bavards et est assez avare en témoignage. Les deux journalistes vont avoir du pain sur la planche pour percer les souvenirs de ce vieillard.

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Pour commencer, Ninella raconte quelques événements de sa vie avant son arrestation, sa mère était une couturière et il l’aidait à son atelier. Son frère l’a mis en garde contre ses agissements qu’il considérait inconscients mais Ninella n’en avait que faire.

-Je ne vais tout de même pas cesser d’être celui que je suis à cause de ces gens-là! Tout le monde a peur, ici.
– Pas toi?
– Mais si, bien sûr… mais ce serait encore pire si je devais faire semblant d’être un autre.

Il est ensuite arrêté et envoyé sur une île où il retrouve plusieurs homosexuels. Il rencontre des hommes aux caractères bien trempés qui, même s’ils subissent le confinement, n’ont pas perdu espoir. Ils sont de tout âge et de tout horizon. On y rencontre des travestis, des jeunots, des grandes gueules.

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Grâce à ses talents de couturier, Ninella peut avoir un travail, il se charge de raccommoder les uniformes des carabiniers. « Moi j’avais le meilleur boulot: j’étais le tailleur des carabiniers. Tous les matins, je les avais là, devant moi, à moitié nus… Il y en avait un qui s’appelait V. Qu’est-ce qu’il était beau! Même 50 ans après, je m’en souviens encore… »

Ninella le reconnaît: la vie sur cette île n’était pas des plus désagréables. Le pire a été le retour chez eux. Quand ils ont dû subir les brimades et les insultes. Même après la fin de la guerre, ces prisonniers n’ont jamais été indemnisés. Cette bd n’aborde pas cette partie et j’ai quelques regrets là-dessus. J’aurais souhaité que d’autres histoires soient abordées, qu’il y ait quelques témoignages en plus. Cette bd aborde un thème très intrigant mais les planches qui évoquent la vie sur l’île sont trop peu importantes. 

Pour ce qui est du dessin, je l’ai trouvé assez beau, les couleurs oscillent entre le jaune moutarde et le noir, ça confère un sentiment de nostalgie. Les traits sont assez carrés mais ce n’est pas pour me déplaire.

Finalement, une bd intéressante mais qui manquait de quelques planches…

En Italie, il n’y a que des vrais hommes de Luca de Santis & Sara Colaone, Editions Dargaud, 2010, 173 pages

8 réflexions sur “ En Italie, il n’y a que des vrais hommes – Luca de Santis & Sara Colaone

  1. celina dit :

    Je ne connaissais pas du tout cette bd. Je retiens pour le sujet. J’aime beaucoup les bd sur des événements historiques, vus à travers un personnage.
    J’ai lu sinon »Quatre coeurs imparfaits ». Le dessin m’a plu, le texte également mais frustrée qu’il soit si court. .j’ai même cru qu’il manquait des pages. Dommage…

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