Robinson– Laurent Demoulin

Le printemps fait semblant d’être l’été, à la façon dont Robinson et moi faisons semblant d’être un père et un fils.

Les premiers mots

Au pied du trône

Soudain, Robinson se met à pleurer. Sa tristesse ne va pas crescendo: elle semble immédiatement profonde – ou plutôt, sans fond. Rien ne la tempère ni ne la médiatise: c’est un diamant de malheur inconditionnel. Comme il ne parle pas, qu’il n’a jamais parlé – pas un mot, pas une phrase -, je ne dispose que de peu de moyens pour comprendre la raison de ses larmes?
S’ennuie-t-il? Trouve-t-il soudain que la vie est absurde? A-t-il mal aux dents? Faim? Soif? Est-il traversé par une idée noire? Est-il envieux? Anxieux? Tracassé? Torturé par une angoisse intime? Ou par l’angoisse de son père?

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Ginny Moon– Benjamin Ludwig

Je vérifie que ma bouche est fermée pour que personne ne puisse voir à l’intérieur de mon cerveau.

Les premiers mots

Le bébé électronique en plastique n’arrête pas de pleurer. Mes Parents-pour-toujours disent que c’est pareil qu’un vrai bébé même si je pense le contraire. Il est jamais content. Même quand je le berce. Même quand je change sa couche et que je lui donne son biberon. Si je dis chut, chut, chut et que je lui donne mon doigt à suçoter, il a l’air bête et c’est tout, et il hurle, hurle, hurle. Lire la suite

Marcher droit, tourner en rond-Emmanuel Venet 

Au fond je n’aime pas les cérémonies des funérailles parce que leurs tissus de mensonges me ramènent à la vraie vie.

Les premiers mots

Je ne comprendrai jamais pourquoi, lors des cérémonies de funérailles, on essaie de nous faire croire qu’il y a une vie après la mort et que le défunt n’avait, de son vivant, que des qualités. Si un dieu de miséricorde existait, on se demande bien au nom de quel caprice il nous ferait patienter plusieurs décennies dans cette vallée de larmes avant de nous octroyer la vie éternelle; et si les humains se conduisaient aussi vertueusement qu’on le dit après coup, l’humanité ne connaîtrait ni les guerres ni les injustices qui déchirent les âmes sensibles.

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Le club des miracles relatifs – Nancy Huston

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Les premiers mots

Quatre hadrosaures viennent chercher Varian à l’aube, un pour chacun de ses membres au cas où il aurait planqué des armes dans son lit, ils garent leur fourgon blindé pile à l’entrée arrière du chalet des Lupins Rouges, traversent le hall à grands pas sans regarder les distributeurs automatiques qui vendent boissons gazeuses et sandwichs, capotes et barres de chocolat, pénètrent dans l’ascenseur, ignorent patiemment la voix féminine électronique les prévènant que les portes vont se refermer, qu’ils sont arrivés au premier étage et que les portes vont s’ouvrir, longent le couloir à pas lourds et pourtant rapides, passent devant des dizaines de portes identiques hormis le chiffre cerclé de rouge en leur milieu, arrivent à celle qu’ils cherchent et, sans effort et quasiment sans bruit, en font sauter la serrure.

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À l’intérieur – Jodi Picoult

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Résumé: Adolescent atteint du syndrome d’Asperger, Jacob Hunt ne possède pas le mode d’emploi pour communiquer avec les autres. Enfermé dans sa bulle, il est pourtant d’une intelligence prodigieuse. Un sujet le passionne plus que tout : la criminalistique. Il parvient souvent à se rendre sur des scènes de crime, où il ne peut s’empêcher d’expliquer aux policiers comment faire leur travail. En général, il tombe juste. 
Mais lorsqu’un assassinat se produit dans le quartier, l’attitude de Jacob est un signe flagrant de culpabilité pour la police. Pour la mère et le frère de Jacob, l’intolérance et l’incompréhension qui ont toujours menacé leur famille ressurgissent brutalement. Et cette question lancinante, qui ne laisse pas leur âme en paix… Jacob a-t-il, oui ou non, commis ce meurtre ? Quand votre fils ne vous regarde jamais dans les yeux… comment savoir s’il est coupable ?

Les premiers mots

Partout où je regarde, des signes de lutte. Le courrier éparpillé sur le sol de la cuisine, les tabourets renversés. Le téléphone jeté par terre, sa batterie suspendue à un écheveau de fils. Sur le seuil du séjour, une légère empreinte de pas, dirigée vers le corps sans vie de mon fils, Jacob.

Il gît devant la cheminée, la tempe et les mains ensanglantées. L’espace d’un instant, je demeure pétrifiée, le souffle coupé.

Brusquement, il redresse le buste.
– Maman, tu ne cherches même pas!

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