Nirliit– Juliana Léveillé-Trudel

Vas-y, frappe, c’est rien à côté de ce que j’ai enduré.

Les premiers mots

La route est longue jusqu’à chez toi, Eva. Salluit, 62e parallèle, bien au-delà de la limite des arbres, Salluit roulé en boule au pied des montagnes, Salluit le fjord au creux des reins, et, seize kilomètres plus loin seulement, le grand détroit d’Hudson qui te conduira peut-être jusqu’à l’océan Arctique, qui sait.

Là-bas, les filles sont mères très jeunes, l’alcool est considéré comme refuge, les enfants sont les enfants de tous, les morts ne sont pas recherchés et les disparitions n’inquiètent que peu de monde. Là-bas, c’est à Salluit. Là, où la narratrice vient en missionnaire s’occuper des enfants dont personne ne s’occupe. C’est toujours avec le cœur lourd qu’elle repart vers le sud, laissant à l’abandon ces êtres chers. 

Cette fois-ci son retour se fait dans la douleur, Eva, son amie est décédée. Sans explications, sans corps de la défunte. En racontant l’histoire de cette amie, la narratrice peint le portrait de habitants et de leurs vies au milieu de la misère. Avec son regard de « blanche », elle pose un regard qui se veut sans jugement. Elle essaie de comprendre pourquoi l’alcool est si souvent bu, pourquoi le taux de suicides est alarmant, pourquoi les jeunes filles s’amourachent des hommes à la peau claire qui les abandonnent après une nuit d’amour…

Vous manquez d’espace dans votre immensité nordique. Comment ça se fait que toute cette richesse ressemble tellement au tiers-monde?

Le récit est divisé en deux parties. La première peut sembler décousue puisqu’elle aborde plusieurs petits moments de vies. La deuxième raconte l’histoire du fils d’Eva, le récit est alors plus linéaire. Ces parties sont toutes les deux empreintes de la même force d’écriture.

L’autrice amène une vision singulière sur ces humains avec poésie et surtout avec une certaine clarté. Ces Premières Nations souffrent et continueront de souffrir et s’intéresser à elles c’est permettre de voir autre chose et de laisser tomber les stéréotypes.

Les Editions de la Peuplade édite décidément de bien belles pépites comme De bois debout de Jean-François Caron.

– Nirliit de Juliana Léveillé-Trudel, Editions de la Peuplade, 2018 (2015 au Canada), 175 pages – 

26 réflexions sur “Nirliit– Juliana Léveillé-Trudel

  1. Lili dit :

    Je l’ai acheté tout dernièrement. Je comptais le lire pour le mois québécois puis bon ben, force est de constater que c’est loupé. Mais il ne devrait pas tarder pour autant ! Je suis très curieuse de découvrir cette écriture qui me semble sensible et étrange en feuilletant des extraits.

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