Le mieux serait de prendre la fuite. Jusqu’à présent tout avait bien marché. Elle ne voulait pas penser à l’avenir.
Les premiers mots
Le jour baissait. Helge Gram tourna l’angle de la rue au moment même où la musique militaire avançait dans la via Condotti. Elle jouait à une allure entrainante un couplet de la Veuve Joyeuse, le transformant en une fanfare sauvage.
Quand il la voit pour la première fois dans les rues de Rome, Helge n’est pas tout de suite attiré par Jenny. Il faudra quelques jours ( et qu’elle mette une jolie robe…) pour que ses sentiments changent. De son côté, Jenny ne le trouve pas à son goût. La jeune fille préfère s’amuser avec ses amies et peindre plutôt que de penser aux choses de l’amour.
Cependant, à l’époque où vivent nos deux personnages, début 1900, il est souvent obligatoire de se ranger, les sentiments viendront après n’est-ce pas? C’est ce que pense Jenny dont la relation avec Helge va envoyer valser toutes ses certitudes sur l’amour et sur la vie. Arrivée à Rome pour se consacrer à la peinture, la jeune Norvégienne n’avait pas le projet de tomber amoureuse. « J’avais vingt-huit ans quand j’ai rencontré Helge. Je n’avais jamais éprouvé d’amour pour personne. J’étais lasse de ne pas aimer.«
Plusieurs fois elle s’était demandé au sujet d’un homme ou d’un autre : est-ce lui? Elle aurait pu aimer peut-être si réellement elle l’avait voulu. Dès qu’elle essayait de se persuader et de fermer les yeux sur cette petite chose qui éveillait en son cœur une sorte de vive résistance, un combat se livrait en elle. Elle n’avait jamais rencontré personne qu’elle se sentit forcée d’aimer. Aussi n’avait-elle pas osé. Non, pas elle!
Je m’arrête là pour le résumé qui relate les cent premières pages et surtout que vous pouvez lire sur la 4e de couverture.
En parlant de la 4e de couverture, celle-ci m’a bien embêtée. Je pensais qu’elle m’avait même dupée en me vendant un roman sur l’émancipation féminine. Et c’est là toute la magie d’une lecture commune, ici avec Lili, elle nous fait réfléchir et revoir les opinions parfois étriquées. Pendant toute une partie du livre, je n’ai pas cru que Jenny était le personnage décrit comme « puissant et fragile ». Je pensais qu’elle se fourvoyait complètement dans ses histoires, qu’elle avait aussi de sacrées œillères et qu’elle devait enfin dire d’aller se faire voir à tous ces hommes qui pensaient à sa place. Mais l’autrice a bien réussi son jeu en insufflant des réflexions très profondes et des attitudes qui me font penser que Jenny est en effet un personnage révolutionnaire pour l’époque. Ses sentiments sur ses désirs, qu’ils soient d’amour ou de liberté, sont tour à tour contradictoires mais tout cela vient du fait qu’elle avait l’habitude qu’on pense pour elle. Jenny ne sait sur quel pied danser, entre envie d’être indépendante et envie de ressentir une passion dévorante.
Je suis passée par de multiples émotions la concernant, j’ai même dit à Lili que je ne savais pas si j’avais aimé le livre ou pas. Il est certain cependant que ce titre nous a marquées plus profondément qu’on ne l’aurait cru. Ce n’est donc pas un hasard que l’autrice ait reçu le prix Nobel de littérature en 1928.
Jenny de Sigrid Undset
Traduit du norvégien par Marthe Metzger
Éditions Cambourakis
432 pages, publication originale 1911
Les Classiques c’est fantastique – Saison 3

Pour ce dernier lundi du mois de novembre, nos fantastiques classiques se parent de prénom et de noms… On lit quoi chez : Moka / Lolo / Natiora (1) (2) / Alice / Cléanthe / Marilyne / Lili (1) (2)/ Mag / Lilly / L’Ourse bibliophile / Katell / Madame Lit / Un livre un thé / Pati / Carnet de textes
Merci pour la découverte, cette chronique laisse en effet planer le doute sur ton avis !
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Et avec le temps qui a passé, je peux te dire que cette lecture est très marquante.
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J’avais misé sur Jane Eyre mais ce titre me va tout autant. Plus confidentiel, donc nécessairement il m’interpelle. Hâte de voir cette avalanche de prénoms pour cette semaine classique !
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Ah Jane Eyre…je l’ai lu deux fois, une troisième lecture aurait été de trop 🙂
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Ta présentation intrigue et tente !
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Merci pour ce billet sur une romancière dont je n’avais jamais entendu parler.
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C’est chouette quand une lecture commune permet de voir les choses différemment, de réfléchir sur le texte. Je ne connais pas ce titre, mais ta chronique m’intrigue ! Merci pour la découverte !
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Il aura fallu que Lili me rappelle que vous aviez acheté ce titre devant moi, j’avais complètement oublié ^^ Il ne me tente pas vraiment mais j’ai aimé lire comment vos échanges avaient modifié ta façon de lire ce texte.
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Lire avec Lili c’est tout un programme 🙂
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L’écriture n’a donc pas vieilli ?
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L’écriture non. Par contre certains passages m’ont choquée.
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Je ne connaissais pas ce titre… En tous les cas, lire des Prix Nobel, c’est souvent perturbant.
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J’ai lu plusieurs titres de l’auteure quand j’étais au lycée (c’est dire si ça remonte), dont celui-ci, mais n’en ai gardé aucun souvenir… je craignais que ses romans aient mail vieilli, mais je vois que ce n’est pas quelque que tu évoques ici..
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J’ai trouvé le roman très accessible pour l’époque et j’ai hâte d’en lire d’autres.
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Alors, tu as aimé ou pas? En tout cas ton billet me donne bien envie.
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Oui 🙂
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Je découvre l’autrice grâce à toi, tu ne sembles guère enthousiaste.
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Si si…mais c’est une lecture qui perturbe. L’héroïne semble insaisissable.
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Je ne connais pas du tout cette autrice norvégienne, merci pour la découverte, tu donnes envie de lire Jenny, je note !!!
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