Là où se termine la terre – Désirée & Alain Frappier

Toute ma vie, j’ai vu mourir. Les gouvernements ont beau changer… C’étaient toujours les mêmes fusils!

Du Chili, ou plutôt de son histoire, je ne connais que le nom de Pinochet associé à la dictature mais dont les détails m’échappent. Il fallait que notre challenge des fantastiques classiques nous emmène en Amérique du Sud ( voir ici pour ma première lecture d’un auteur brésilien), pour que les contours de la Cordillère des Andes se dessinent devant mes yeux.

Au hasard d’une virée en librairie, je suis tombée nez à nez avec cette bande dessinée volumineuse et au titre sacrément poétique. J’ignorais alors qu’il était la traduction du mot Chili. Quand j’ai appris cela, une image d’immensité s’est forgée dans mon esprit (qui doit être grandement influencée par mon envie irrépressible de fouler un jour cette terre-là).

Et d’immensité il en sera question dans l’histoire de Pedro et de sa famille car tout commence avec ce grand-père libanais qui arrive au Chili, pays de secousses sismiques et d’éruptions volcaniques. Ensuite le petit-fils, Pedro, et ses rêves de grandeur, cependant malmené par la vie et la séparation de ses parents dans un Chili qui se veut grandiose, notamment avec cette coupe du monde de 1962, ses nobles causes pour plus d’égalité mais malheureusement jamais atteintes, l’élection de 1964 où Salvador Allende se représente pour la 3e fois. La pauvreté est partout et le président fraîchement élu, Eduardo Freir, oublie très vite ses promesses d’économie florissante. Devenu adulte, Pedro s’engagera au côté du MIR (Mouvement de la gauche révolutionnaire) et combattra pour un Chili plus juste.

L’immense bibliothèque de mon père n’a pas survécu à notre départ. L’exil est une page blanche qui nous force à abandonner nos livres. Tour à tour inspectée, pillée, détruite, volée,… À notre retour, elle n’était plus que vide et absence….

Si l’histoire se termine en 1970, Pedro nous propose à la fin de la bande dessinée de lire ce qui est advenu de ses parents, de sa famille et de ses proches compagnons. Certains ont quitté le pays la peur au ventre, d’autres sont restés et ont payé de leur vie.

Je ne m’étais jamais intéressée à cette période et sans vous mentir, j’ai eu légèrement honte de ne pas être au courant des atrocités perpétrées sous la dictature de Pinochet. Alain et Désirée Frappier ont rencontré Pedro et le récit a été écrit ensemble. Ce sont les mots de Pedro associé aux talents de ses ami.es. L’émotion est au coeur de ce récit et il arrive sans difficulté à nous immerger dans ce Chili révolutionnaire où chaque petite victoire était considérée comme phénoménale. La bande dessinée n’oublie pas de faire le parallèle avec Cuba et le Che qui donna un véritable élan au peuple chilien pour s’opposer au régime en place.

Pour vous immerger dans cette période du Chili où les chants avaient une importance considérable, vous pouvez écouter l’artiste Violeta Petra avec son très beau Gracias a la vida (en boucle dans mes oreilles).

Si j’étais parfois tenté de dire « il » en évoquant mon enfance et ce moi qui n’est plus moi depuis si longtemps, c’est le « nous » qui me vient pour la suite. Un nous qui enveloppe tant de situation et de souvenirs d’une époque où j’avais la délicieuse impression d’être moi et d’être aussi plusieurs. « 

Je me suis entre-temps offert le 2e volet qui recouvre l’histoire du Chili de 1970 à 1973.

Là où se termine la terre de Désirée et Alain Frappier
Éditions Steinkis
261 pages, février 2017

Les classiques c’est fantastique!

Mon acolyte Moka a aussi lu une bande dessinée pour répondre au thème latino…Je vous laisse la lire.

…c’est chez moi!

Je rejoins dès aujourd’hui l’équipe des hôtesses (Moka, Noukette et Stéphie) de la BD de la Semaine. On lit quoi chez …

PatiVore

Nath

Eimelle

Mylène

Antigone

Jérôme

Maël

Moka

Laeti

Stéphie

Caroline

Karine