Les mots écrits, ceux des livres, enseignent mais ils préservent aussi, même s’ils racontent les choses les plus folles et les plus cruelles, parce qu’ils ont été écrits par quelqu’un qui a pris le temps de les penser.
Dans la langue de leurs couples, le « Je » était le pronom perdu.
Les premiers mots
Pour célébrer l’élection d’Obama, les frères Wiley organisèrent une grande réception chez eux, dans le sud-est de Londres. Ils vivaient près du Crystal Palace Park, où l’émetteur de radiodiffusion s’élève vers le ciel comme une petite tour Eiffel, austère et métallique le jour, rouge et illuminée la nuit, dominant de toute sa hauteur les quartiers voisins, les comtés limitrophes de la capitale et, dans le parc étendu à ses pieds, les restes de l’ancien royaume de verre – le lac, le labyrinthe, les statues grecques brisées, les lions de pierre érodées et les sculptures de dinosaures érigées par les scientifiques d’une époque révolue.
Quand du whisky ne lui coulait pas dans les veines, Willard se rendait à la clairière matin et soir pour parler à Dieu. Arvin ne savait pas ce qui était le pire, la boisson ou la prière.
Les premiers mots
En un triste matin de la fin d’un mois d’octobre pluvieux, Arvin Eugene Russel se hâtait derrière son père, Willard, le long d’une pâture dominant un long val rocailleux du nom de Knockemstiff, dans le sud de l’Ohio.
Et Kristín et moi nous sommes aimés chaque nuit. Nos doigts. La peau. Les étoiles. Le ciel nocturne. Et cætera.
Les premiers mots
Je ne sais pas combien de temps nous étions restés endormis sur la couverture lorsque le bourdonnement nous réveilla. – Tu as déjà vu autant de mouches? me demanda Kristín en les éloignant d’un geste de la main. – Ce ne sont pas des mouches, répondis-je. Ce sont des points à la fin des poèmes que je vais composer pour toi.
Bonsoir, je t’appelle, comme tu me l’as proposé, parce que j’ai besoin que tu me fasses rire pour oublier ce trou dans lequel je tombe en spirale.
Les premiers mots
Le soir où mon père est mort, on s’est retrouvés en voiture avec mon frère, parce qu’il faisait nuit, qu’il était presque 23 heures et que passé le choc, après avoir bu le thé amer préparé par l’infirmière et avalé à contre-cœur les morceaux de sucre qu’elle nous tendait pour qu’on tienne le coup, il n’y avait rien d’autre à faire que de rentrer.