Viol, une histoire d’amour– Joyce Carol Oates

Oui, elle leur avait peut-être souri, et donc elle l’avait bien cherché.

Les premiers mots

Après qu’elle eut été violée, frappée, battue et laissée pour morte sur le sol crasseux du hangar à bateaux du parc Rocky Point. Après qu’elle eut été traînée dans le hangar par ces cinq types ivres – à moins qu’ils aient été six ou sept – et sa fille de douze ans avec elle qui hurlait Lâchez-nous! Ne nous faites pas de mal! Ne nous faites pas de mal s’il vous plait!

« Elle l’a bien cherché« ,  » elle était habillée pour que ça lui arrive« , « elle ne faisait que boire et aguicher les hommes« …. Ces phrases vous disent peut-être quelque chose quand elles parlent de victimes de viol.
Elles sont parfois énoncées à voix basse ou tout haut pour « rigoler ». Elles proviennent de la population mais aussi des gens de lois, ceux qui ont le pouvoir.  Les victimes sont alors détruites une seconde fois. Tina en a fait les frais. Après avoir vécu un viol collectif sous les yeux de sa fille et laissée pour morte, elle va devoir subir un avant-procès mené par un juge abominable pour lequel Tina n’est qu’une aguicheuse.

Oates s’attaque de nouveau à un sujet méga sensible où chaque mot blesse et retourne le ventre. La grande dame arrive à bousculer les lecteurs en s’emparant de faits sordides pour pointer du doigt les dysfonctionnements du système judiciaire et les failles qui engloutissent les victimes.

La narration joue un rôle important car elle permet de donner la parole à la fille de Tina, qui a tout vu, tout entendu et qui n’oubliera jamais ce que sa mère et elle ont vécu.

Dès que ta mère et toi avez été traînées dans le hangar de Rocky Point, tu as commencé à exister dans l’après. Jamais plus tu ne pourrais exister dans l’avant.

Encore une fois, J.C Oates bouscule son lecteur et le fait passer par de multiples émotions. 

– Viol , une histoire d’amour de Joyce Carol Oates, Editions Philippe Rey, Collection Fugues, 2018 (version poche), 192 pages – 

21 réflexions sur “Viol, une histoire d’amour– Joyce Carol Oates

  1. maghily dit :

    J’ai des frissons rien qu’à lire ta chronique : la lecture de ce roman n’a pas dû être facile.

    Ce n’est pas le genre de lecture qu’il me faut pour le moment, mais je la note dans un coin de ma tête.

    Chaque fois que tu parles de cette autrice, je me dis qu’il faudrait vraiment que je la découvre mais elle a écrit tellement que je ne sais par quoi commencer. 😉

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  2. flyingelectra dit :

    il n’y avait pas de petite fille, mais en te lisant, je pense au film Les Accusés avec Jodi Foster, qui jouait le rôle de cette jeune femme qui a un peu trop bu, un soir dans un bar, et se fait violer par plusieurs hommes et tout le monde lui dit que c’est de sa faute : sa jupe trop courte, son rire, elle avait bu.. un film qui m’a profondément marqué et qui devrait aujourd’hui, avec ce qui se passe, être diffusé dans les lycées…

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