[Les chroniques oubliées – 5] 

Ce ne sont plus des chroniques oubliées mais des chroniques déterrées! J’ai enchaîné plusieurs lectures pour lesquelles l’envie/l’inspiration/le temps m’a manqué pour rédiger des billets individuels.  Je les reprends donc ici pour vous offrir un cinquième round.

Au programme: de l’émotion (beaucoup), des frissons et quelques abandons. Lire la suite

Arrête avec tes mensonges!– Philippe Besson

Je me dis que ce n’était pas une histoire de corps, mais de nécessité.

 

Les premiers mots

C’est la cour de récréation d’un lycée, une cour goudronnée cernée de bâtiments anciens aux fenêtres  et hautes, à la pierre grise.
Des adolescents, sac à dos ou cartable posé aux pieds, discutent par petits groupes, les filles avec les filles, les garçons avec les garçons. Si on observe attentivement, on repérera un surveillant, à peine plus âgé.

 

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Ginny Moon– Benjamin Ludwig

Je vérifie que ma bouche est fermée pour que personne ne puisse voir à l’intérieur de mon cerveau.

Les premiers mots

Le bébé électronique en plastique n’arrête pas de pleurer. Mes Parents-pour-toujours disent que c’est pareil qu’un vrai bébé même si je pense le contraire. Il est jamais content. Même quand je le berce. Même quand je change sa couche et que je lui donne son biberon. Si je dis chut, chut, chut et que je lui donne mon doigt à suçoter, il a l’air bête et c’est tout, et il hurle, hurle, hurle. Lire la suite

La Belle rouge– Anne Loyer

Arrête de réfléchir, Marje, arrête!
Pour une fois, Marje, ne réfléchis pas. Agis. Tu verras bien après.

Les premiers mots

Il ne sait même plus pourquoi il est là. Avec sa basket gauche trouée, son blouson ouvert aux quatre vents, son sac à dos à moitié vide, sa caboche pleine à craquer. Il est là. Debout. Raide comme un piquet sur ce bitume sale et lui. En transit. En partance. En attente. Les yeux grands ouverts sur la nuit qui ne veut pas fini. Lourde, opaque, mystérieuse. Et après, il se passe quoi?

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Dites-leur que je suis un homme– Ernest J. Gaines

– Tu es un homme Jefferson, bien plus que moi.
– Parce que j’vais mourir bientôt ? ça fait de moi un homme , monsieur Wiggins?

Les premiers mots

Je n’étais pas là, et pourtant j’y étais. Non, je ne suis pas allé au procès, je n’ai pas entendu le jugement parce que j’avais toujours su ce que serait le verdict. Et pourtant j’étais là. J’étais là autant que les autres. J’étais assis derrière sa marraine et ma tante, ou à côté d’elles. Ce sont des femmes corpulentes, mais sa marraine est la plus forte des deux.

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Patricia– Geneviève Damas

Offre-lui une vie qui vaut le prix de sa traversée.

Les premiers mots

Je vous attendais, Patricia. J’espérais que vous viendrez. Du café, je scrutais le port. Cela fait trois jours. Je me disais:  » Il y a peu de chances pour qu’elle vienne, mais on ne sait jamais. » Quand vous avez marché sur la jetée, je vous ai reconnue tout de suite. Je ne pouvais voir les détails de votre visage, mais à votre manière d’avancer, cette manière d’avancer toujours, j’ai su que vous étiez arrivée.

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Marcher droit, tourner en rond-Emmanuel Venet 

Au fond je n’aime pas les cérémonies des funérailles parce que leurs tissus de mensonges me ramènent à la vraie vie.

Les premiers mots

Je ne comprendrai jamais pourquoi, lors des cérémonies de funérailles, on essaie de nous faire croire qu’il y a une vie après la mort et que le défunt n’avait, de son vivant, que des qualités. Si un dieu de miséricorde existait, on se demande bien au nom de quel caprice il nous ferait patienter plusieurs décennies dans cette vallée de larmes avant de nous octroyer la vie éternelle; et si les humains se conduisaient aussi vertueusement qu’on le dit après coup, l’humanité ne connaîtrait ni les guerres ni les injustices qui déchirent les âmes sensibles.

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