Les papillons volent mieux que les éléphants
Les premiers mots
Pendant le petit déjeuner, mes parents écoutent toujours la même station de radio. Ce matin, entre la rentrée des classes, la menace terroriste et les mégapromos sur le jambon, c’est encore plus démoralisant que d’habitude (en tout cas lorsqu’on s’appelle Mathilde Fournier, que l’on a quatorze ans et que l’on aurait vraiment besoin d’entendre autre chose que les réclames du coin ou les infos déprimantes de France et d’ailleurs).
Aujourd’hui est un matin de « première fois ».
Je suis rentrée dans cette lecture à pas feutrés, sachant pertinemment que j’allais être émue. Ça n’a pas manqué. Je la connais, la Annelise, c’est son troisième roman que j’aborde après « Sweet Sixteen » et « Là où naissent les nuages« . Et celui-ci est définitivement mon préféré. De part le thème et son écriture.
Elle aborde ici un sujet compliqué, l’anorexie mentale d’une jeune fille de quatorze ans, Mathilde.
Sa grand-mère adorée est décédée d’un cancer depuis quelques mois mais elle n’arrive pas à en faire le deuil. Ses parents passent sous silence leur tristesse et celle de leur fille. Personne ne parle et tout le monde garde sa peine. Heureusement, Mathilde peut compter sur sa pétillante meilleure amie, Louison, pour s’épancher. Pour se distraire, elle a recours à ses entraînements d’athlétisme, discipline dans laquelle elle s’accomplit.
Le jour de la rentrée, tous les élèves n’ont d’yeux que pour le changement radical d’une élève, Cézanne. Cette transformation touche en plein cœur Mathilde. Cette fille lui renvoie tout ce qu’elle n’est pas, ou croit ne pas être. C’est le premier déclencheur.
Le deuxième arrive lors d’un essayage de robe pour le mariage de la sœur de Louison. Mathilde essaye une robe bleue, magnifique, mais dont la fermeture Éclair bloque. Un détail. Un choc interne. Une envie de changer. Et la machine est lancée : Mathilde se met au régime.
Louison a tort. Aucune robe ne réussira jamais à donner l’illusion que je suis devenue papillon.
Tout simplement parce que je ne suis pas un papillon.
Je suis une chenille flanquée de deux énormes cuisses.
Elle confie à Louison son envie de régime et celle-ci la met en garde en la rassurant! Mathilde n’en a pas besoin! Mais elle n’en a que faire et continue. Elle est quand même la seule à décider de son corps.
Voilà dix jours que j’ai amorcé ma transformation. En secret je m’allège. Je fais de la place pour mes ailes.
La descente en enfer commence inexorablement. La chasse aux calories est enclenchée, la sensation de faim se fait de plus en plus forte mais Mathilde tient bon et se sent supérieure aux autres. Elle, elle domine son corps.
Quelques personnes s’inquiètent du changement mais Mathilde est au-dessus. Elle sait ce qu’elle entreprend. Elle croit se contrôler.
J’ai littéralement dévoré ce bouquin. Incapable de le lâcher, j’ai vécu avec Mathilde ce que vivent des milliers de jeunes filles. Ces victimes qui ont l’illusion de maîtriser leurs corps et leurs pensées. L’illusion aussi que les autres ne peuvent pas comprendre.
Annelise Heurtier se plonge dans le monde de l’adolescence et le regard implacable des autres, la sacro-sainte mode et ses diktats, les It-irls mises en avant qui font rêver des filles et les plongent en Enfer. Elle se permet des références qui feront échos aux adolescents mais sans jouer sur le pathos et égrène des messages d’espoir. L’auteure joue aussi beaucoup sur les métaphores et ses procédés sont assez poétiques.
Après avoir lu plusieurs romans sur ce sujet, celui-ci est un peu plus « léger », non, il n’y a pas d’hospitalisations, non, il n’y a pas de sondes, mais de la bienveillance de la part des amis de Mathilde et de l’amour ce qui permet de ne pas tomber dans le dramatique tout en diffusant un message de prévention.
Un livre qui résonne en moi et que je garde précieusement.
– Le complexe du papillon d’Annelise Heurtier, Editions Casterman, 2016, 195 pages-
Ce livre rentre dans la catégorie « Un livre avec un animal dans le titre « du Challenge littéraire 2016 de Mille vies en une.
Tu m’as convaincue, je vais craquer 🙂
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Ahahah pour tous les livres que tu m’as convaincue de lire (et que je ne regrette pas!) Tu as le droit de craquer! 😉
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J’ai découvert cette auteure avec « Sweet Sixteen », que j’ai beaucoup aimé. Le thème et ta façon de parler du « Complexe du papillon »… eh ben, je craque.
P.S. Mes réponses au tag sont en ligne!
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C’est définitivement mon préféré! 😉
( Je vais aller voir ça de sitôt!😀)
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Une auteure que je n’ai toujours pas lue… Ta chronique me donne très envie de découvrir ce livre (et la plume de l’auteure), d’autant plus que ce sujet me touche énormément !
Merci pour cette découverte 🙂
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Je t’invite à la découvrir et en plus si le thème te touche, fonce! 😉
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Je ne lis pas de roman jeunesse mais le sujet me parle ! une très belle chronique en tout cas et ton tag sera publié cette semaine aussi !
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J’aimerais te convaincre un jour 😉
(Youhou, je l’attends avec impatience! ;-))
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Sweet Sixteen est dans ma pal depuis trop longtemps, il faudrait que je m’y mette !
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Mais oui! Et je te conseille fortement celui-ci!
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Après « Refuges », j’avais l’envie de lire à nouveau Annelise Heurtier, mais quelque chose me retenait avec ses autres romans. Les sujets trop proches de celui de « Refuges » peut-être. Mais celui que tu présentes me parle à 100% et me tente beaucoup!! D’office, je poursuivrai avec l’auteure, avec ce titre!
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Il est mon préféré et « Refuges » me tente aussi!
Je suis contente de te tenter😀
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Merci pour ton billet, j’aime beaucoup l’approche de ce roman qui mise sur la bienveillance pour parler de l’anorexie . Je note !
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C’est ce côté qui m’a plus en effet! Et pour avoir lu sur ce thème, ça change!
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